đ Mirage aux Moyades
Encore une fois, le Mako II met le cap sur les Moyades.
Le bateau est plein Ă craquer, au point que Guy a dĂ» sortir son propre semi-rigide. Sur le pont, ça s’affaire, ça plaisante, ça rĂ©vise les plans de plongĂ©e pendant que le soleil grimpe lentement au-dessus de Marseille.
La mer est belle, le ciel clair, et le bleu provençal s’orne de petits cumulus lĂ©gers, promesse des lumiĂšres d’hiver que les photographes adorent.
Déjà , tout semble briller un peu plus fort.
Les Moyades attirent comme un aimant.
Site mythique du Parc national des Calanques, ce coin de roche et de courant regorge d’une vie exubĂ©rante.
Tous ceux qui y ont plongĂ© en gardent un souvenir vibrant. Et l’envie d’y retourner, encore et encore.
Préparatifs
On s'amarre au Nord de l'Ăźlot. Autour du pavillon Alpha, les discussions s’animent :— On fait le tour ?
— Trop long, faut pas traĂźner si on veut remonter dans le temps.
— La face nord alors ? Les gros mĂ©rous, les bancs de corbs…
— Ou la face sud ? Les sars tambours, les murĂšnes dans les failles ?
— Et le tombant est ?
— Oui, ce fabuleux tombant ! Et je veux retrouver la gorgone rouge du couloir vertical (voir l’article sur la gorgone rouge).
— Et la pointe au sud, les dentis, les bĂ©cunes, parfois mĂȘme les thons !
Le plan se dessine, les palanquĂ©es se forment, les sourires s’Ă©changent.
Les premiers plongeurs s'immergent. Pour nous ce sera en deuxiÚme rotation. Nous prenons notre tour de sécurité surface.
A l'horizon, les impériaux du large se découpent, rappelant que le parc est immense et plein de promesses.
Incident de surface
Cinquante minutes plus tard, les premiers plongeurs remontent, visages épanouis, yeux brillants.
Les Moyades sont accueillantes aujourd'hui.
C’est notre tour.
Je capĂšle, vĂ©rifie mon matos — et lĂ , Paf !
Mon flexible de mano Ă©clate net. Un sifflement sec, le genre de son qu’on n’oublie jamais.
Xavier, juste Ă cĂŽtĂ©, rĂ©agit immĂ©diatement : il ferme mon robinet d’un geste sĂ»r, me fait signe “OK, on regarde ça”.
Je décapÚle, dépité. Fin de plongée ? Pas question.
La solidaritĂ© plongeur fait son Ćuvre.
Christophe propose d’Ă©changer nos manos, Xavier fouille les coffres du bateau pour trouver des outils, et pendant que le bateau tangue doucement, on dĂ©monte, on remonte, on vĂ©rifie.
Trois minutes plus tard, c’est reparti.
Un vrai travail d’Ă©quipe, silencieux et efficace.
Merci les copains — sans vous, cette plongĂ©e aurait pris fin avant mĂȘme de commencer.
Immersion
La bascule arriĂšre, l'instant sublime, puis le silence.
Tout s’apaise.
Les premiers mĂštres sont baignĂ©s de lumiĂšre. La surface miroite au-dessus, l’eau se densifie.
Déjà , mille choses à voir.
Vouloir tout observer ici, c’est vouloir compter les Ă©toiles.
Dans la coulĂ©e, vers dix mĂštres, j’aperçois les gorgones rouges que j’espĂ©rais revoir. Elles sont lĂ , mais recouvertes d’un voile d’algues sombres. Dans la nature, tout est lutte permanente.
Sur la gauche, fidĂšle au poste, un mĂ©rou. Il repose sur “sa” gorgone, maĂźtre paisible des lieux. Je le salue d’un signe, sans approcher. Nous ne sommes qu’en visite.
Plus bas, le tombant se déploie. Les gorgones dressent leurs éventails fascinants.
La vie palpite à chaque anfractuosité.
Corail rouge et Doris Dalmatienne |
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Ponte de Doris |
Le corail rouge flamboie sous les phares — l’une des merveilles de notre MĂ©diterranĂ©e (voir l’article sur le corail rouge).
Et parfois, la surprise se glisse dans l’image : sur une photo, une forme floue, Ă droite du cadre… une doris ! Et une espĂšce que je crois n’avoir jamais photographiĂ©e.
C’est ça, la magie. DĂ©couvrir l’inattendu, l’improbable, et sentir naĂźtre l’envie irrĂ©pressible de replonger pour retrouver cette Ă©motion-lĂ .
![]() |
Polypes de corail rouge |
Nous quittons le tombant, portés par un léger courant d'Est.
Vers la pointe
Il est temps de faire demi-tour.
Et soudain, deux plongeurs apparaissent au loin.
L’apparition
Retour
En quelques secondes, il disparaĂźt.
Trop loin, trop vite, trop beau.
Mais la joie reste, profonde, vibrante.
Le genre de bonheur qui vous remplit tout entier, comme une marée lente.
Sur le chemin du retour, tout semble plus lumineux. Les bécunes glissent, les girelles jouent dans le courant, les murÚnes se devinent dans leurs failles.
Le bleu s’Ă©claircit, la surface approche.
Remontée.

On devine un grand pagure à cÎté de la murÚne. |
Un dernier palier Ă 3 mĂštres et retour sur le bateau.
Sourires.
Et ce sentiment d’avoir vĂ©cu un instant suspendu, fragile et Ă©ternel Ă la fois.
Merci Xavier, merci Christophe. Sans vous, ce mirage aurait coulĂ© avant mĂȘme de naĂźtre.
En bonus, le Kécecé du jour :
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